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Exposé sur la fuite des cerveaux

Posté par Rehma, mise à jour le 14/04/2023 à 02:42:54

INTRODUCTION

I. DEFINITION DE LA FUITE DES CERVEAUX

II. BREF HISTORIQUE, AMPLEUR ET PROBLEMES CAUSES PAR LA FUITE DES CERVEAUX EN AFRIQUE

III. LES FACTEURS INFLUENÇANT LE DEPART DES CERVEAUX AFRICAINS

IV. LES RAISONS D’ATTRACTION DES CERVEAUX PAR CERTAINS PAYS.

1. Le cas des Etats-Unis

2. L’Europe et la politique d’attraction des cerveaux

3. Le cas de la France

V. LES TENTATIVES DE RAPATRIEMENTS DES CERVEAUX PAR LES GOUVERNEMENTS AFRICAINS ET LES OBSTACLES AU RAPATRIEMENT MASSIF

VI. LES MAUVAISES CONSEQUENCES DE LA FUITE DES CERVEAUX EN AFRIQUE

CONCLUSION


INTRODUCTION
Les migrations internationales constituent un phénomène complexe et leur impact sur les pays d’origine et de destination engendre un intérêt croissant chez les décideurs politiques, les scientifiques et les institutions internationales. La pression migratoire a augmenté ces dernières années et devrait s’intensifier dans les prochaines décennies du fait de l’accroissement des différences salariales et démographiques entre pays développés et pays en développement. Comprendre et mesurer les conséquences pour les migrants, les non-migrants et les résidents des pays hôtes est une tâche ardue et complexe.

I. DEFINITION DE LA FUITE DES CERVEAUX
La perte de personnel qualifié (à différents niveaux) à cause de l'émigration d'un pays vers d'autres est largement connue sous le nom de ''fuite de cerveaux''. Les définitions de fuite de cerveaux sont multiples et souvent discordantes quant aux typologies des émigrants que l'on y inclut. Ce terme peut en effet se référer exclusivement aux couches plus élevées, qui comprennent les scientifiques et les professionnels hautement qualifiés (highly skilled professionals), aux techniciens spécialisés, voire même aux ouvriers spécialisés.
Ce personnel migrant est généralement composé :
• de personnes ayant un niveau d'instruction élevé qui émigrent des pays en voie de développement pour s'unir à la main d'œuvre de ceux plus développés;
• d’étudiants qui, pour des études ou une formation, se transfèrent dans des pays plus développés en décidant ensuite d'y rester. Les approches théoriques les plus courantes interprétant le phénomène de la fuite des cerveaux conduisent à trois théories principales :
• théorie de l’offre et de la demande
• théorie du capital humain
• théorie de push hand pull
A cela s’ajoute la théorie de « stream and counter stream theory », qui considère que le choix d'émigrer comporte l'évaluation d'une série d'obstacles qui interviennent entre les facteurs d'attraction et ceux de répulsion. Parmi les facteurs qui influencent la décision d'émigrer, sont les suivants :
• facteurs associés au pays d'origine;
• facteurs associés au pays de destination;
• obstacles qui interviennent;
• facteurs personnels.

Dans cette vision dynamique des migrations, les facteurs "push" et "pull" sont donc enrichis par des facteurs qui interviennent continuellement et peuvent à tout moment changer les équilibres du système de lignes de force en influençant ainsi le processus décisionnel.

II. BREF HISTORIQUE, AMPLEUR ET PROBLEMES CAUSES PAR LA FUITE DES CERVEAUX EN AFRIQUE
La circulation des élites est un phénomène qui existe depuis des siècles. Les étudiants venus de l’Europe entière se pressaient déjà dans les Universités médiévales pour suivre les enseignements de professeurs de nationalités différentes. C’est vers les années 1950 que ce phénomène considéré jusqu’alors positivement commence à poser problème, et en 1963, le terme de “brain drain” apparaît dans la revue scientifique britannique “The Royal Society” et vise les migrations de scientifiques et d’intellectuels britanniques vers les USA, particulièrement les médecins et les chercheurs en sciences médicales.
Le terme ne s'appliquait pas, alors, à la venue d'étudiants originaires des pays en voie de développement vers les Universités des pays développés. En effet, en 1960, les étudiants étrangers n'étaient que 245.000 et ce n'est que dans les années 1970 et 1980 que leur nombre s'accrut considérablement puisqu'en 30 ans, il a été multiplié par 5, pour atteindre 1.178.000 en 1990 parmi lesquels, au moins les deux 2/3 proviennent des pays en développement).
Comme dans le même temps, il apparaissait que de plus en plus de ces étudiants restaient dans les pays du Nord, une fois leur diplôme obtenu, le terme de “brain drain” leur a aussi été appliqué alors qu'il n'était, au départ, utilisé que pour les migrations de scientifiques et professionnels d'Europe vers les USA.
A partir de la fin des années 1960, un débat a opposé défenseurs du Tiers-Monde considéré comme pillé de ses élites et défenseurs d'un libéralisme où le marché est censé diriger les talents vers les lieux de leur meilleure rémunération et utilisation.
La polémique s'est développée dans les années 1970 et des mesures drastiques furent même proposées pour lutter contre la "fuite des cerveaux", telle que la taxation des pays qui en sont bénéficiaires, au profit des pays victimes. Mais les mesures proposées pour arrêter l'exode ne donnèrent pas les résultats attendus, faute d’être réellement applicables et appliquées.

III. LES FACTEURS INFLUENÇANT LE DEPART DES CERVEAUX AFRICAINS
Le bonheur est le terme le plus haut et le plus lointain que tout individu poursuit en ayant le pressentiment de ce que serait une existence comblée. Le bonheur, c’est ce qui est concrètement poursuivi à travers l’idée d’une vie meilleure. Le bonheur est une expérience qualitative unissant la satisfaction et la signification et impliquant à la fois la densité d’un plaisir spirituel et existentiel, et la transparence d’une conscience adhérant à sa propre vie et à ses propres choix.

Le bonheur suppose d'abord une conversion à la liberté qui surgit au cœur même de la dépendance et de la souffrance.

La crise, lieu de naissance d’un nouveau désir, devient comme existence l’origine et la source d’une reconstruction de la vie. Dans l'expérience de la crise, " la conscience prend en fait position contre sa propre souffrance, et cette prise de position est déjà un acte de liberté" (ibid.). Le sujet se trouve alors confronté à un choix crucial : "le mouvement passif vers la destruction ou l'effort actif vers la survie." (….) Bref, il s’agit de considérer la souffrance non comme l’expression d’une structure permanente de la condition humaine, mais comme le surgissement d’une détresse contingente. Il faut se dire ces deux décennies, beaucoup d’Africains n’ont pas connu le bonheur, mais ont plutôt vécu des périodes de crise sans fin.
Dans le cas de l’Afrique noire, la frustration des professionnels est encore plus grande. Imaginez un médecin compétent qui n’arrive pas à sauver les malades parce qu’il manque de médicaments et de matériel de travail. Un informaticien qui enseigne l’informatique sans disposer d’ordinateur, un physicien ou chimiste dispensant des cours sans pouvoir faire des travaux de laboratoire avec ses étudiants. Un chirurgien qui doit opérer des malades sans disposer de salle d’opération convenable et sans disposer de matériel de chirurgieA ce manque de matériel s’ajoute la non-reconnaissance de l’utilité du travail et souvent l’insuffisance voire l’absence et presque pas de gratification. . Cette frustration peut décourager plus d’un si on ajoute à cela le manque fréquent de reconnaissance, que l’on observe souvent chez les employeurs en Afrique.
Tandis que ceux qui travaillent pour développer le pays sont clochardisés, des courtisans qui souvent ne font rien d’extraordinaire s’adonnent aux délices de Capou. Certains intellectuels qui entrent dans les grâces des oligarchies maffieuses finissent par y perdre leur âme et oublient complètement ce menu peuple qui serre la ceinture pour qu’ils puissent faire des études.
Les sociétés africaines, qui sont concernées par la fuite des cerveaux en tant que problème par rapport à leur besoin de développement, sont en général celles qui, dès la période des indépendances, ont adopté à l'égard de la classe des intellectuels trois types d'attitudes :

• l'intimidation, pour ceux qui, déployant leur sens de la lucidité critique ont tenté de mettre à nu leurs défaillances, leurs ruses, leur mauvaise foi, leur cynisme et leurs fuites en avant. C'est ce qui explique le fait qu'un nombre important d’intellectuels de grande valeur présents à l'étranger soient des exilés politiques.

• L'asservissement du dynamisme intellectuel à l'idéologie et aux pratiques sordides du régime par des stratégies de corruption et de clientélisation politique.

• La précarisation et la clochardisation des génies : les salaires des agents de l'armée, de la police, de la gendarmerie, de la justice et de tout ce qui constitue ce que Louis Althusser a appelé « appareils répressifs d'État », de même que ceux des journalistes des médias d'État (« appareils idéologiques d'État ») atteignent le double, voire le triple des salaires des médecins, des chercheurs, d'enseignants d'universités, etc.

La fuite des cerveaux, dans ces conditions, peut être considérée comme le révélateur de la tyrannie des États désertés, et en même temps, comme la réponse à l’obligation pour chaque intellectuel, de valoriser les dons qu’il possède. Et on devrait pouvoir y voir une forme de patriotisme qui n'est pas allégeance à sa communauté, mais à l'humanité à travers une autre communauté qui rend possible la valorisation du génie intellectuel.

IV. LES RAISONS D’ATTRACTION DES CERVEAUX PAR CERTAINS PAYS.
On peut se demander maintenant pourquoi certains pays attirent les cerveaux plus que d’autres. Nous allons évoquer ici les cas des Etats-Unis et de la France pour étayer les facteurs d’attraction de ces cerveaux. Nous gardons à l’esprit toutefois que tous les pays développés en général, attirent les cerveaux d’une manière ou une autre, bien que les flux soient bien variables. Les politiques mises en place pour attirer ces cerveaux, les liens historiques, l’existence d’une communauté de parenté déjà installée dans le pays d’accueil, les conditions salariales et les facilités d’intégration, l’insécurité et la dégradation et de l’économie et des conditions de travail dans le pays d’origine jouent un rôle important. Mais l’espérance de trouver un travail en adéquation avec sa formation et son expérience, de recouvrer sa dignité et d’évoluer dans sa carrière me semble être les leitmotivs qui poussent nombreux professionnels du Sud à s’exiler en Occident.
1. Le cas des Etats-Unis
Dans le monde entier on évoque l’attirance des cerveaux par les USA. 2500 scientifiques suisses établis aux USA et au Canada sur un total estimé à 85000 détenteurs d’un passeport suisse et d’un diplôme universitaire. L’étude visait à dessiner les tendances et à évaluer les risques pour l’avenir.

L’enquête a révélé que même s’il n’y a plus tellement de terre à défricher, l’esprit pionnier guide maintenant le progrès face au progrès scientifique et au développement technologique. L’une des grandes motivations pour un ingénieur américain est de travailler sur un projet neuf, ambitieux, un peu fou même s’il lui est bien expliqué, avec la perspective d’en voir à terme le résultat sur le marché. Il y a du respect pour les créateurs en Amérique et particulièrement au Québec. Il est frappant selon les conclusions du rapport d’observer l’immense respect dont peuvent jouir les créateurs, qu’ils soient artistes, penseurs et entrepreneurs. Créer dans un pays neuf, étant l’essence même de son développement, leur avis est écouté, sollicité et souvent intégré dans les processus décisionnels. Valorisés par les médias et présentés comme modèles, les créateurs exemplifient le goût du risque et entretiennent le rêve américain : « what can be dreamed, can be done ».
- L’impermanence :
Le défricheur a besoin de structures légères, mobiles, flexibles, adaptables. Ce qui est vrai aujourd’hui ne l’est plus demain, et doit être modifié en conséquence. L’improvisation est son pain quotidien. Il y a non seulement une utilité, mais parfois une beauté du provisoire et de l’impermanence, lorsque sont libérées les énergies. L’acceptation de la non-perfection, état provisoire jusqu’à la prochaine idée par essence tout aussi imparfaite, devient un style, qu’il est permis de ne pas aimer.
Le détachement : des maisons sans histoire transformables au gré des envies, des relations sociales plus faciles à quitter car plus faciles à construire, la notion dans une société pionnière, que l’acquis d’aujourd’hui ne l’est plus demain, l’encouragement certainement. Ce n’est pas bien sûr le détachement bouddhiste, mais une remarquable mobilité physique et intellectuelle qui caractérise la société américaine.
- La science et la technologie :
Les sciences et la technologie occupent une place privilégiée dans le débat public et au sein des médias. La science et la technologie comme éléments incontournables du progrès et du bien-être ne sont pas ressenties aux USA comme des fatalités, mais comme des défis, des chances à saisir, des paris sur l’avenir. Ceci explique l’attitude très positive de la société nord-américaine face à la recherche universitaire ou l’innovation industrielle. Mais cela peut aussi évoluer en une relation dangereuse entre médias et monde scientifique, et éluder tout débat critique.
- La formation comme branche industrielle
Considérée comme une industrie de services, l’éducation, prise au sens large du terme, génère des revenus internationaux qui la classent au 5ème rang du secteur tertiaire. Au moment de la publication de ce rapport en 1998, la Californie par exemple accueillait le plus grand contingent d’étudiants étrangers, soit 50 000 personnes qui dépensaient au moins 700 millions USD par an (465000 et 7 milliards au niveau national). Plus de la moitié de ces étudiants provenaient des neufs pays asiatiques : Japon, Chine, Corée, Inde, Taiwan, Malaisie, Thaïlande, Indonésie, et Hong Kong.
Au niveau sous-gradué, ces étudiants apportaient du capital et leur fraîcheur intellectuelle. Les Etats-Unis ont compris mieux et plus tôt que les autres comment créer de la richesse avec les chercheurs gradués et post-gradués étrangers. En effet, quel pays réussit partiellement à financer sa recherche nationale par les bourses et salaires qu’amènent les scientifiques venant d’ailleurs ! … Ce n’est pourtant pas qu’en moyenne, le niveau, l’infrastructure et les moyens des institutions américaines soient tellement supérieurs, mais les centres d’excellence sont vraiment excellents et savent le faire savoir.
2. L’Europe et la politique d’attraction des cerveaux
La migration des professionnels répond à un besoin et à une offre existante. Ceci est confirmé dans le livre vert de la Commission européenne sur la migration économique. Selon le Groupe d'information et de soutien des immigrés – GISTI - association indépendante à but non lucratif, le livre vert sur une approche communautaire de la gestion des migrations économiques de la Commission européenne reconnaît l'impact que le déclin démographique et le vieillissement de la population ont sur l'économie et souligne la nécessité de revoir les politiques d'immigration pour le long terme. Des flux migratoires plus soutenus pourraient être de plus en plus nécessaires pour couvrir les besoins du marché européen du travail et pour assurer la prospérité européenne. Ceci met en lumière l'importance d'assurer qu'une politique européenne en matière de migration économique apporte un statut légal et une panoplie de droits garantis qui puisse soutenir l'intégration de ceux qui ont été admis.

3. Le cas de la France
Cette politique de l’Union Européenne a été réaffirmée par le Ministre de l’Intérieur et président de l’UMP Nicolas Sarkozy et le Premier Ministre Dominique de Villepin du gouvernement Jacques Chirac, au lendemain du non français au référendum sur la Constitution européenne. M. Nicolas Sarkozy affirmait qu’il faut reconnaître au gouvernement et au Parlement le droit de fixer chaque année, catégorie par catégorie, le nombre des personnes admises à s'installer sur le territoire français". Ceci, selon lui, pour choisir les flux migratoires et non pas les subir, soulignant en passant que d’autres pays comme la Grande-Bretagne, le Canada, la Suisse l’avaient déjà fait. Un de ses arguments cités est qu’en ce moment, moins de 5 % des immigrés viennent pour répondre à des besoins précis de l'économie, ce qui n'empêche pas les autres de peser eux aussi sur le marché du travail.
Selon toujours le Ministre Nicolas Sarkozy, "il faut un meilleur équilibre entre l'immigration de travail et l'immigration de droit. « Nous devons attirer des travailleurs qualifiés, des créateurs d'entreprises, des chercheurs, des professeurs d'université, par un système de points à la canadienne. Il faut être plus volontariste et exigeant en matière d'accueil et d'intégration »". De son côté, Dominique de Villepin mettant en avant la tradition humaniste de la France s’est refusé à la politique des quotas ethniques ou par nationalité des migrants. Il a soutenu la politique de son ministre de l’Intérieur en disant : "Que nous soyons soucieux de planifier les besoins de l'économie française en prenant en compte par profession ces besoins, en liaison avec les pays sources de l'immigration, quoi de plus naturel".
Dans son rapport, la mission Weil propose de « Faciliter le traitement des demandes de visa de long séjour des étudiants en acceptant, notamment, de donner au service culturel le rôle principal». Elle précise que «le traitement de l'intégralité du dossier par le service culturel serait la règle et le contrôle par le service consulaire l'exception» et recommande également de mettre en œuvre «le traitement du dossier par correspondance»

V. LES TENTATIVES DE RAPATRIEMENTS DES CERVEAUX PAR LES GOUVERNEMENTS AFRICAINS ET LES OBSTACLES AU RAPATRIEMENT MASSIF
Jusqu’à récemment, les pouvoirs publics africains ne semblaient pas s’inquiéter outre mesure du déficit de main-d’œuvre qualifiée, tandis que les organismes de financement du développement aggravaient souvent le problème en obligeant les pays bénéficiaires à engager des expatriés étrangers comme condition à l’octroi de prêts. De plus, les hommes politiques qualifiaient souvent leurs compatriotes ayant opté de travailler et vivre à l’étranger de mauvais patriotes. Mais la montée en flèche de l’émigration de personnes qualifiées et les graves carences du continent sur le plan des ressources humaines en ont conduit plus d’un à changer d’avis.
La fuite des cerveaux a d’autant moins de chance de s’arrêter rapidement que l’Occident mène une politique d’attraction alors que les pays africains n’ont pas les moyens pour mettre en place une politique incitative cohérente et durable. Ils ne peuvent pas pour l’instant compter sur leurs propres efforts sans recourir à l’aide internationale, ce qui les met comme toujours dans une situation de dépendance.
On constate en effet, que le retour des cerveaux est plus réalisable et plus efficace dans les pays développés et dans les pays nouvellement industrialisés et en transition. Dans les pays hautement industrialisés, la recherche qui conduit à l’innovation est la source la plus importante de la compétitivité. Cette recherche nécessite des matériaux, de l’outillage et de l’infrastructure, mais l’élément humain avec un cerveau très performant est le plus important parmi les facteurs clés du succès.
Ces pays ont ou mettent en place des centres d’excellences où les chercheurs, les enseignants et les techniciens peuvent faire la recherche et en même temps continuer à acquérir de nouveaux savoirs et nouvelles compétences. Ils ont ainsi plus de chance de voir leurs techniciens et scientifiques émigrés revenir, surtout quand les pays sont stables, l’économie en bonne santé, et qu’ils peuvent assurer leurs salaires régulièrement. Peu de pays africains remplissent ces conditions.

VI. LES MAUVAISES CONSEQUENCES DE LA FUITE DES CERVEAUX EN AFRIQUE
Les problèmes causés par la fuite des cerveaux en Afrique sont résumés dans ce qui suit par Mme Ndioro Ndiaye de l’Organisation Internationale pour les migrations (OIM, 2000) :
• En dépit d’une assistance technique au développement d’environ 4 milliards de dollars US par an, l’Afrique continue de souffrir d’un manque de ressources humaines qualifiées ;
• la fuite des cerveaux vers les pays d’outre-mer handicape l’Afrique dans son effort de construction d’économies nationales viables et stables ;
• la perte en ressources humaines est difficile à chiffrer, mais on peut estimer à plusieurs centaines de milliers le nombre de personnes ayant quitté le continent pour l’Amérique du Nord et l’Europe mais aussi d’autres régions du globe. Parallèlement, les pays africains emploient quelques 100,000 experts internationaux dans des secteurs vitaux au développement
• la continuité du phénomène de fuite des cerveaux met en péril l’avenir du continent et accentue encore les disparités de niveau de développement entre l’Afrique et le reste du monde ;
• souvent, les professionnels africains quittent leurs pays d’origine afin d’étudier ou de travailler à l’étranger et planifient de rentrer chez eux. Cependant, plus les années passent plus leurs chances et opportunités de retour s’estompent, privant leurs pays d’origine d’un apport d’expertise indispensable ;
• un des facteurs les plus sérieux incitant des jeunes Africains à quitter leurs pays d’origine réside dans la mauvaise qualité des institutions d’éducation supérieures et des universités sur le continent ;
• les universités africaines produisent un surplus de diplômés qui ne peuvent être absorbés par les marchés du travail nationaux en raison d’une disparité croissante entre les formations académiques proposées et les qualifications recherchées par les acteurs des secteurs de développement prioritaires ;
• l’absence de moyens financiers nécessaires constitue un obstacle majeur au retour des professionnels et de leurs familles; les allocations et bourses d’études n’incluent pas toujours les frais de transport pour le retour vers le pays d’origine ;
• selon des enquêtes récentes, les raisons pour lesquelles les professionnels africains quittent leurs pays d’origine résident moins dans les arguments liés aux salaires, que dans les facteurs suivants :
 absence d’opportunités d’accomplissement professionnel ;
 absence de positions adéquates dans leur pays d’origine ;
 situations et conditions socio-économiques et politiques difficiles ;
 profusion de pratiques subjectives dans l’attribution de postes
 professionnelles (népotisme, corruption, tribalisme, etc.)

Pour faire comprendre les dommages causées par la fuite des cerveaux en Afrique, nous recourons à la théorie de la gestion du savoir du cycle de gestion du savoir : Le professionnel qui part a en effet un savoir et un savoir-faire qu’il mettait à la disposition de ses étudiants ou de ses collègues de travail. Le transfert du savoir d’un individu dépend de ses connaissances, de son expérience de travail, de son tempérament, de sa capacité de communiquer, de l’environnement du travail. Ces notions de gestion du savoir et de gestion de compétences sont donc cruciales pour comprendre l’importance de garder les cerveaux sur place. Cela explique également pourquoi les pays qui disposent de moyens essayent de les attirer du monde entier.

Le départ des professionnels crée un vide dans le cycle de gestion du savoir étant donné que ces personnes partantes ont un savoir et une expérience à transmettre aux nouvelles générations. Nous retrouvons les explications dans les lignes suivantes qui expliquent la transmission et la gestion du savoir.

Le modèle de la figure 1 montre comment les processus de savoir sont gérés en gestion du savoir (GS) pour transformer le savoir en action et pour atteindre les résultats désirés, c’est-à-dire créer de la plus-value pour l’organisation ou pour des opérations particulières. Le cycle comprend trois dimensions générales : la gestion, l’application et les personnes :
• La gestion consiste à déterminer, organiser, faciliter et acquérir le savoir.
• L’application consiste à retrouver efficacement le contenu approprié au moyen de recherches avancées et d’explorations afin d’effectuer du travail et des tâches liés au savoir et à utiliser les résultats pour faire des découvertes.
• La dimension des personnes s’intéresse à l’apprentissage, au partage et à la collaboration. C’est la composante de l’éducation du cycle.

Bien que les personnes, individuellement et en groupes, fassent partie de toutes les dimensions, soit comme « producteurs » de savoir de départ, soit comme «consommateurs» de savoir dans les dimensions de la gestion et de l’application respectivement, c’est dans la dimension des personnes que leur contribution à la mémoire collective est maximisée. La technologie peut les aider; mais, en bout de ligne, c’est leur capacité d’utiliser ce qui est disponible et d’innover à partir de là qui créera la plus-value réalisée en GS. Les activités qui se produisent pendant le cycle sont décrites brièvement ci-dessous.



CONCLUSION

Ce travail nous aura montré qu’après les indépendances des pays africains, dans les années 60, la grande majorité des étudiants et stagiaires rentraient chez eux à la fin de leur formation. Il est vrai qu’à cette époque la personne terminant ses études en Occident n’avait aucun problème à trouver du travail à son retour En outre, la situation d’instabilité due aux dictatures et à l’extension de la Guerre Froide en Afrique, qui les a accompagnées, n’était pas encore répandue dans plusieurs pays.

Plusieurs facteurs sont à la base de la migration des professionnels africains aujourd’hui à savoir : l’insécurité physique et économique, le chômage et l’absence de sécurité sociale, la fracture scientifique entre l’Afrique et l’Occident. Dans bon nombre de cas, ces problèmes sont liés principalement à la mauvaise gouvernance et un ordre économique international défavorable en général aux pays pauvres. Il y a également des Etats qui manquent tout simplement de ressources naturelles, et qui sont aussi parfois handicapés par les calamités naturelles. Ceux-ci peuvent être excusés pour cette fuite de cerveaux, du moment qu’ils s’investissent comme ils peuvent dans la recherche du bien de leurs populations. Malheureusement, parmi ceux qui partent, seule une partie peut trouver un travail dans son domaine de compétence. Le reste est condamné au chômage ou à devenir des ouvriers diplômés non qualifiés (ODNQ).

Peut-on culpabiliser ceux qui partent comme le font un certain nombre de citoyens africains ? Un bon nombre de pays africains, surtout en Afrique noire, ont connu des crises profondes qui ont bouleversé la vie des gens à cause de l’insécurité physique (guerres) ou économique (guerre, mauvaise gouvernance, calamités naturelles). Mais ce qui révolte surtout les peuples africains, c’est la mauvaise gouvernance pratiquée par les élites africaines en collaboration parfois avec une « certaine élite occidentale ».

Le professionnel africain qui tente d’échapper à des conditions d’insécurité physique ou économique en mettant en péril son existence, n’a pas à culpabiliser parce que comme le dit MacIntrye : « L’attachement à une patrie n’est raisonnable, que si cette patrie développe le sens de l’appartenance commune, à travers des politiques et institutions dont le fonctionnement exprime sans ambiguïté l’idéal de solidarité et de bien commun », ce qui n’a pas été le cas jusqu’aujourd’hui dans plusieurs pays africains.

A la fin de ce travail, en tenant compte de la mondialisation, parlons plutôt de la circulation des cerveaux que de la fuite des cerveaux, en espérant que les pays et leurs professionnels migrants vont de plus en plus chercher des terrains d’entente pour collaborer synergiquement dans le développement de leurs pays, dans la lutte contre la pauvreté, dans l’expansion de la démocratie et l’instauration de la bonne gouvernance.



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